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Mes courses

54. La diagonales des Fous 2023

19 Octobre 2023 , Rédigé par Pascal HOUVET Publié dans #Ultra Trail

A ce qui parait, la Diagonale des Fous serait l’un des trails les plus durs au monde, si ce n’est pas une excellente source de motivation !!!!

Ce trail est unique et surement un poil mythique pour de nombreux traileurs/traileuses.

Situé sur l’ile de la Réunion à près de 9000km de la Métropole, il défend ardemment la valeur fondamentale que représente le trail, l’authenticité !

Par son biais, Il permettra au traileur un réel dépassement de soi, ce qui le fera évoluer à travers réflexion/introspection et ouverture d’esprit !

Pour faire simple, c’est un échange avec soi-même (plus intime, plus profond) !

Au travers de cette quête spirituelle, sportive et toutefois exigeante, il faut y voir des personnes engagées, évoluant sans artifice dans un milieu exigeant, par moment même hostile mais, dans une nature préservée. Pourquoi un tel laïus ?

Car, cet évènement n’est pas régit par l'argent , je fais référence à l’expansion grandissante de l’UTMB sur la scène internationale.

La Diag c’est un tout autre délire, c’est avant tout une célébration, une fête, l’ile toute entière est en pleine effervescence pendant près d’une semaine !

Pour beaucoup d’entre nous, obtenir le fameux T-shirt jaune "J’ai survécu" s’apparente à l’accomplissement ultime, c’est un peu la course d’une vie (bon, chacun son point de vue, de mon côté, il s’agit juste d’une étape obligatoire pour entamer la suite plus sereinement).

Informations :

Il existe 4 formats, mais je ne vais pas m’attarder dessus, allons à l’essentiel !

Donc, la course principale et la plus populaire, c’est bien la Diag ≈170km pour ≈ 10 000m D+ et la particularité de cette épreuve c’est que les bâtons sont interdits.

Le principe est de traverser l’ile du sud au nord, de St Pierre à St Denis.

Le tirage au sort est une chose, le budget en est une autre…

Billet(s) d’avion(s), hébergement, l’inscription, voiture de location… (l’addition monte très vite).

Comme indiqué un peu plus haut, course exceptionnelle = budget exceptionnel !

Seule certitude, l’abandon est inenvisageable !!

Niveau "état d’esprit" et contrairement à l’Echappée Belle, je suis dans un bon "mood", je suis détendu, très serein, je n’ai aucun doute, aucune appréhension, pourtant le défi qui s’annonce est de taille ! (Pas de bâtons/chemins très escarpés/climat…).

Pour récupérer son dossard (c’est toute une histoire) …c’est comme à la Poste, il faudra s’armer de patience !

Rendez-vous à St Pierre, seul le coureur sera autorisé à passer (il ne s’agit pas d’un village trail traditionnel où tu viens faire ton shopping en famille).

C’est plutôt le parcours client Ikea, tu suis le sens de la flèche.

A savoir,

-> 5 départs différés (brochette d’environ 600 coureurs).

La n° de vague est défini selon le niveau du participant (index de performance) il sera indiqué sur le dossard. Bonne nouvelle, je suis en vague 2 juste derrière les Elites J.

L’édition 2023 : Départ le jeudi 19 octobre à partir de 21h.

Les préparatifs sont dingues, le Boulevard Hubert Delisle (le coin le plus fréquenté de St Pierre) est vide sur des kilomètres, c’est impressionnant !

Petit conseil, venez sur les coups de 17h et garez-vous au parking (derrière le cimetière), c’est surement l’endroit le plus pratique.

Déjà 18h !

C’est l’heure de manger un Poulet Massalé (spécialité locale) en plus, l’accompagnement est hyper efficace et tiendra au ventre (riz + lentilles) et ça me laissera le temps de digérer.

19h passé, il est temps de se trouver une place (parmi les dizaines de milliers de personnes) j’ai besoin de me détendre avant le grand départ !

Je me pose avec la famille sur un rond-point en face de l’entrée des combattants !

L’ambiance est exceptionnelle, je n’ai jamais vécu une telle agitation, c’est irréel et très difficile à décrire, ce moment est à vivre !!

J’essaie tant bien que mal de me reposer, malgré les cris des gens, les différentes scènes musicales poussées à fond, les speakers qui baragouines tout et n’importe quoi ...ICI c’est de la folie !!

Allez, c’est l’heure !

Une dernière photo de groupe et je m’engouffre dans la fosse (l’avant sas de départ).

J’ai à la main mes deux sacs d’allégement mais à chaque point de contrôle, je me fais arrêter car je ne porte pas le T-shirt du grand Raid (apparemment il est obligatoire au départ et à l’arrivée).

Du coup, très très gros coup de stress…car il est resté à la maison !

Après avoir forcé 4 des 5 points de contrôle, je me retrouve nez à nez avec le responsable de l’organisation et au vu mon degré de panique et afin de me rassurer, il a eu la gentillesse de m’expliquer l’importance du T-shirt sur la zone de départ et m’a laissé passer à titre exceptionnel en me rappelant qu’il devra être porté lors du franchissement de la ligne d’arrivée !

Ouf, quel soulagement !!

Voilà comment je vois les choses :

0-72 km : Départ/Cilaos -> Préambule

72-127 km : Cilaos/Deux Bras -> La course commence ICI

127-170 km : Deux Bras/ la redoute -> Quelques efforts modérés

0-72 km : Le moment tant attendu est enfin arrivé !

Entassé les uns sur les autres derrière un grillage, on nous libère comme si nous étions des animaux en cage, au vu notre empressement, ça doit être forcément le cas !

Ce qui est sûr, c’est que nous partageons un même but !

On se dirige donc tous anarchiquement vers cette arche de départ pour un décompte collectif,

10 ; 09 ; 08 ; 07 ; 06 ; 05 ; 04 ; 03 ; 02 ; 01 ; GO GO GO !!

C’est parti pour au moins 2 jours de course.

L’ambiance est terrible, c’est une dinguerie totale, Il y a du monde partout sur des kilomètres et des kilomètres, cette frénésie est tellement puissante qu’elle nous force à taper dans les mains de centaines de personnes… et gare aux abstentionnistes !!  

Au risque de les froisser !

De mon côté, je me prends tellement au jeu que j’ai couru à 12.3km/h sur les 5 premiers kilomètres (du grand Pascal !!!!)

Et je vais continuer mon grand n’importe quoi sur les 3 prochains kilomètres (en plus, c’est de la montée), mais, comment rester insensible face à autant de ferveur, voir autant de personnes t’encourager au bord de la route, au pied de chez eux, tu t’efforces donc de le rendre au centuple donc tu cours !

 Aux environs du 7ème kilomètre le bitume laisse place à un sentier traversant d’innombrables champs de cannes à sucre, la seule difficulté c’est cette chaleur étouffante, je dégouline de sueur, il fait trop chaud !

Forcé de ralentir, j’en profite pour jeter un coup d’œil sur mes temps de passage basés sur 42h, je me rends compte que j’étais super ambitieux et qu’il sera difficile de les respecter !

J’arrive néanmoins au 1er ravito (14km/700m D+) au Domaine Vidot en 1h45 et en même temps que la joëlette, l’ambiance est à la fête, l’équipe chante, crie, ça déborde d’énergie !!

J’en profite pour gouter la boisson énergisante du coin (Dynamalt) comme son nom l’indique c’est à base de malt, c’est assez spécial comme gout, c’est pas mauvais mais c’est pas bon non plus !

Je décide donc de me rincer le gosier au Coca (une valeur sure) J et de repartir.

Ensuite c’est 14km et 1200m D+, on entre assez vite dans la pampa, méfiez-vous des racines et des arbres recourbés sur eux-mêmes (attention surtout à la tête, ils sont très bas), prévoir des bouchons au 17ème car quelques passages délicats.

Cette portion me laissera un excellent souvenir, un ravito pirate tenu par des mecs bien éméchés musique à fond en nous proposant des bières !

Arrivé au 21ème kilomètre, chute brutale de la température, elle se traduit par une fine couche de givre sur la végétation.

Prévoir pas mal de bitume à partir du 23ème, passé le 26ème je vous conseille d’enfiler un coupe-vent car à 1600 mètres le vent souffle.

Je quitte ensuite la route pour un sentier très roulant afin d’accéder au ravitaillement de Notre Dame de Paix au 28ème (ravito complet).

Ensuite, direction de Nez de Bœuf, 12km et 670m D+.

Succession de montées et de descentes très accessibles même de nuit.

Au 38ème kilomètre, je profite d’une petite descente pour prendre un peu de vitesse, je me déporte sur la gauche pour éviter une grosse pierre ce qui me fait perdre l’équilibre, la réception est désastreuse, ma cheville tourne brutalement vers l’extérieur, une douleur vive et brève vient me parcourir accompagnée d’un craquement qui vient noircir le tableau…

J’ai à peine le temps de lâcher un « Aie, Putain, sa *** !   » et je m’écrase la tête dans l’herbe…

Je demande aux quelques compagnons autour de moi s’ils peuvent me strapper, mais malheureusement, ils ne me seront d’aucune utilité…

J’attaque donc le Plan B :  Je lasse fortement mes chaussures, j’avance et je serre les dents jusqu’au ravitaillement du 40ème (≈ 2km).

J’arrive sur place rapidement et je m’empresse de demander aux infirmiers un bon strap de bonhomme !

Ma cheville gauche a déjà doublé de volume, j’espère juste qu’il me laisse repartir, j’avoue qu’elle a une salle gueule, c’est loin d’être gagné !

Mais dans mon malheur, je tombe sur des bénévoles sympathiques, rapides et très efficaces, j’en profite même pour faire un selfie avec eux !

Vu le temps passé sur le soin, j’ingurgite une soupe et je repars illico !

J’avoue quand même que ça me fait chier de devoir me taper encore 130 km avec une cheville en vrac, mais bon, je n’ai pas trop le choix !

A partir de maintenant, je me dois d’être plus prudent, il n’y aura pas de 2ème chance.

Je profite de cet éclair de lucidité pour changer de pied d’appui (une galère de plus, car je vais devoir forcer sur mon genoux droit L) # ménisque # aie aie aie.

Mon nouveau cap : le ravito de Marre à Boue au 50ème c’est principalement de la descente (≈ 700m D- sur 10km) c’est très accessible, de la plaine, du chemin de terre et une interminable route goudronnée, mais je maintien une allure de course.

Le jour se lève ce qui me permet enfin de découvrir mon environnement et le ravito qui pointe le bout de son nez !

Ce ravitaillement est parfaitement situé, il se fait faim !

Menu du jour : Patates douces, pates, poulet boucané

C’est le moment de reprendre des forces car la prochaine ascension à l’air méchante (Coteau Kerveguen 2476m (12 km/1000m D+).

Après 9h de course, je fais un break 30 minutes, je vais appeler ça la pause "Miam-Miam".

Bilan des 50 premiers kilomètres, c’est facile !

Malgré ma cheville, je suis en pleine forme, je suis à 5.56km/h, 10‘48/km et je tiens mes prévisions. 

La montée est assez longue et de plus en plus raide, l’herbe laisse place à de plus en plus de garrigue et le soleil commence à taquiner sournoisement.

J’arrive au point culminant en 3h30, très facilement identifiable, il y a un refuge !

Ensuite, c’est beaucoup plus funky, une longue descente sur Cilaos (1ère base de vie) il faut compter 9km pour 1500m D-, peu technique, prise de vitesse facile, mini point d’eau (avec sirop) au 67ème.

Ensuite, c’est de la route sur 5km.

J’arrive assez rapidement à Cilaos sous les encouragements de ma belle-mère smartphone à la main, il est déjà 11h40, j’avoue que les 22 derniers kilomètres sous cette chaleur m’ont épuisé, je suis tout de même content d’arriver à ce point stratégique de la course malgré 1 heure de retard sur ma prévision.

Je décide d’aller voir directement les kinés pour qu’ils puissent me refaire un strap, mais à la vue de ma cheville, l’équipe médicale refuse de me laisser repartir sans l’avis du médecin… Pour une fois que je veux faire les choses bien, privilégiant la prévention et afin d’assurer la suite de l’épreuve, je me retrouve coincé !!

J’ai le droit à un interrogatoire interminable, une palpation minutieuse de la zone douloureuse, mais ils restent perplexes face à l’insensibilité de celle-ci.

Le temps passe… ma famille m’attend… et je commence à perdre patiente, la situation m’agace fortement !

Le médecin arrive enfin et procède de la même façon que son personnel de soin, il me pose de nombreuses questions et test la résistance de ma cheville gauche, l’échange entre nous devient de plus en plus tendu, il me demande de me lever et de sauter vingt fois sur la cheville malade, je m’exécute aussitôt et étonnement sous l’œil du médecin aucune douleur.

Il voit que je suis déterminé et que je n’en ai rien à foutre du risque de rupture ligamentaire et qu’il doit me laisser continuer, il accepte finalement de me libérer et j’échappe de très peu à une disqualification ! J’ai perdu facilement 40 minutes…

Je décide de prendre une douche histoire de faire baisser la température de mon corps.

Je profite ensuite de l’espace de repos que ma famille m’a fabriqué pour me reposer à l’ombre sous cette tente de fortune.

Pendant ce temps ma femme s’occupe de mes affaires et ma belle-mère me masse le dos.

Vu mon état de fatigue, je comprends que je suis bien entamé et que j’ai besoin d’un bon break.

En résumé, cette 1ère partie est un avant-gout de ce qui va arriver, un échauffement, car la course commence vraiment à Cilaos et je vais vite le comprendre !

A savoir qu’il y a beaucoup d’abandons ICI (≈ 200) !

Je m’étais fixé de repartir à 12h finalement il sera 14h !

72-127 km : La reprise est plutôt cool, je me laisse descendre jusqu’à un cours d’eau en contrebas (≈ 500m D- sur 4 km), j’avoisine les 971 mètres d’altitude.

Une fois passé le cours d’eau, ça devient sérieux (500m D+ sur 3km) pour atteindre le ravito du Col De Taïbit, c’est principalement de la forêt.

J’y arrive essoufflé, il est 15h30 et ça fait déjà 18h30 de course !

J’ai la chance d’avoir un coup de téléphone de mon père, ça tombe bien, je vais pouvoir souffler un peu !

Cet endroit est le plus redouté du Grand Raid, c’est ici qu’il y a le plus fort taux d’abandon.

Il y a une navette stationnée devant le ravito, très reconnaissable le cul du bus est signé par le street artiste réunionnais Jace et son alter égo le Gouzou !

De nombreux participants se laissent tenter…

A savoir, que la suite se complique d’avantage, place à l’ascension du Col de Marla pour 800m D+ sur 4KM !! Ça donne 7 KM pour 1300m D+ ENORME, pour environ 82 km….

Le paysage devient très vite menaçant, très escarpé, il y a de la racine, des pierres, des marches, des marches, des marches et encore des marches !

Il y a un épais brouillard sur cette portion et la température a chuté, j’arrive tant bien que mal au sommet, mais vu les conditions, je ne fais pas de vieux os !

Maintenant, place à une descente abrupte sur 2.5km me permettant de rallier le ravitaillement de Marla au 84ème à 18h.

La nuit commence déjà à tomber, je décide de faire une pause (bien méritée).

Je prends le temps de m’allonger et de profiter du buffet chaud, mais je sens qu’il commence à faire très froid, je suis forcé de m’habiller plus chaudement et de repartir, la pause aura quand même durée 1h !

Un peu de descente avant de me diriger vers la Plaine des Merles (7km 500m D+).

Je suis à 25h de course, j’ai ressens le besoin de dormir, je me dis que l’idéal serait d’atteindre le ravito de Grand Place au 105ème, il me suffit de descendre et le tour est joué !!

MAIS finalement la descente devient interminable (≈7km pour 1000m D-), je zig-zag à travers les bois et je finis par rejoindre un petit groupe que je vais suivre jusqu’en bas.

Le plus démoralisant, c’est de croiser une centaine de traileurs endormis au bord du chemin.

Je me suis forcé à maintenir l’allure du groupe tout en titubant jusqu’à arriver au pont de singe (le point le plus bas).

Je m’attendais à tomber sur le ravitaillement mais RIEN DU TOUT !

Je décide de contacter le PC sécurité mais le réseau est tout pourri, on ne s’entend pas !

Et c’est à ce moment-là que j’apprends que le ravitaillement est à 3 kilomètres sur les hauteurs.

Je pète un câble et je décide de m’allonge par terre à côté du pont.

Le sol est caillouteux, il fait nuit noir et il caille sévère mais malgré ça j’utilise mon sac à dos comme oreiller, j’enlève mes pompes, je programme la minuterie sur 30 minutes, je croise les bras et je ferme les yeux. Encore fatigué, je réitère une seconde fois l’opération.

Après cette grosse sieste, je reprends la route, mais je suis encore dans le gaz…

Je me force à avancer le plus rapidement possible afin de me réchauffer, j’en profite pour taper la discute avec deux nanas jusqu’au point de contrôle de Bourse puis j’arrive enfin au ravitaillement de Grand Place au 105ème kilomètre.

Enormément de traileurs endormis et entassés les uns à côté des autres…

Je me glisse sous la tente pour manger un peu, prendre une boisson chaude et essayer de sortir de cette mauvaise passe, je me retrouve avachi sur un banc avec le regard vide, je suis au bout du rouleau, au fond du trou, épuisé mentalement, cassé physiquement…Mais je dois absolument réagir !

Je me force à repartir (dans la souffrance) seulement après 30 minutes.

Conseil : Cet endroit est extrêmement important, il faut absolument vous reposer car la portion suivante (105km-114km) est surement la plus difficile du parcours.

 **OBJECTIF ULTIME** : Atteindre le Ravito de Roche Plate

Monter une grosse bosse de 200m D+ sur 3km, physiquement éprouvant !

Une fois arrivé en haut, je change de versant et c’est parti pour une descente à la fois technique, brutale et interminable) d’environ 650m D- pour 2km.

Le chemin est bien trop escarpé pour prendre une once de vitesse, de plus, il fait nuit noire, je préfère donc suivre le groupe devant moi et prendre mon mal en patience…

Mais cette descente est sans fin, quand je crois être arrivé au bout, j’arrive encore à discerner des loupiottes encore plus bas… c’est désespérant, je déteste cette portion, elle est horrible !

J’arrive finalement en bas, j’ai quand même mis 1 heure pour faire deux pauvres kilomètres…de la pure folie !

Je dois ensuite traverser un cours d’eau me permettant de changer de versant.

La suite du programme : 1 200mD+ sur 8.5km.

A l’instant T, je n’ai pas la force d’affronter cette réalité, je décide donc de faire une halte de 20 minutes contre un gros rocher et d’attaquer ensuite cette nouvelle épreuve avec plus de sérénité.

Je n’avais pas prévu de m’arrêter ici, mais j’ai bien fait, j’en ressors plus frais (dans tous les sens du terme) J.

A mon avis, cette ascension est la plus dure, c’est sûr qu’avec 6000m D+ dans les jambes c’est nettement plus dur !

Pour atteindre le Ravitailement de Roche Plate, il faut emprunter un chemin étroit avec beaucoup marches, prévoir quelques passages aériens (des cordes sont installées pour éviter d’éventuels accidents).

Au fur et à mesure de mon ascension, j’              aperçois au loin les lampes frontales des traileurs sur l’autre versant qui descendent les 650m D- (le fameux passage horrible/interminable).

Le jour commence à se lever et le paysage autour de moi se révèle enfin, c’est extraordinaire !

S’ouvre à moi un endroit à la fois féerique et très mystérieux.

Je prends la mesure du relief particulièrement escarpé et chaotique du Cirque de Mafate, c’est une espèce de jungle montagneuse.

Je continue d’avancer du mieux que je peux, je tombe sur un point de contrôle qui m’indique que je suis à 2 bornes du ravitaillement, un peu de plat, une petite montée, quelques efforts et c’est dans la poche !! J’arrive au ravito après 33h12 de course, j’ai bien mérité de faire une pause !

J’ai la chance de profiter des premiers rayons de soleil, du pur bonheur !

Il est 7h du matin, je mange, je bois, j’expérimente le mélange tomates cerises/pastèques, verdict ça passe super bien (c’est très bon) et je me gave de pommes, je termine avec une soupe chaude aux vermicelles et après 30 minutes de pause, je décide de repartir !

Je me sens d’attaque pour dévaler la très longue descente de 14km/1600m D- et atteindre la 2ème base de vie à « Deux Bras » au 127ème.

Je me sens tellement bien que je décide de suivre une certaine Léa qui est sur le format du Bourbon (109km) ce qui me permet de descendre plus vite, j’ai pu dépasser grâce à elle facilement 80 traileurs.

J’évite ainsi de me griller à mon allure habituelle (trop énergivore), je reste lucide et j’avoue que je m’éclate grave ! Ça doit bien être la première fois que je suis quelqu’un en descente J.

L’effort est mesuré, ça reste une très bonne idée !

Malgré la chaleur qui s’intensifie, on rallie rapidement le point de contrôle « Les Oranger » (119ème).

Non loin de la Passerelle d’Oussy (125ème), nos chemins se séparent car je commence à fatiguer.

Je la laisse continuer devant et je vais profiter de la rivière en contre bas.

J’ôte chaussures, chaussettes et je fais trempette dans l’eau fraiche de la rivière, un pur bonheur !

A peine 40 minutes plus tard, j’arrive à la base de vie de « Deux Bras » au 127ème.

Je vois cette base de vie comme une demi victoire, je suis plutôt bien dans ma tête et mon corps est OK !

Je traverse le cours d’eau en sautant de rocher en rocher et je croise un regard familier assorti d’un joli T-SHIRT rose Rondoudou !!

Génial, ma femme a pu me rejoindre, trop de la balle !!

Ce n’était pas prévu initialement.

Car pour se rendre sur place c’est toute une mission, il faut trouver le point de ralliement, emprunter un 4x4 (…).

En tout cas je suis très content et soulagé de la retrouver !

A savoir que ce ravitaillement est assez particulier, il est tenu par des soldats, c’est à la fois impressionnant et intimidant, passé le point de contrôle, j’entre dans cette base militaire un mélange entre tentes kakies et camions de l’armée !

Je vais de surprise en surprise, je découvre avec appétit les menus du jour : Rougail saucisse-morue / Poulet Boucané / Riz/lentilles.

Gourmandise oblige, je fais un mix des 3 propositions, je récupère mon sac d’allègement et je retrouve ma femme pour une gestion de mon sac à dos, je profite d’une séance de massages et d’un changement de tenue pour un break de 1 heure. 

J’ai beaucoup de chance de l’avoir à mes côtés, elle me connait par cœur, elle gère de ouf !

Sans elle, je ne suis pas sûr d’aller au bout de mes courses !

Elle me force à finir mon repas, me déplace à l’ombre car la chaleur est écrasante et m’improvise une douche avec un tuyau d’arrosage.

J’ai passé un excellent moment sans me soucier du temps qui passe J.

Une fois requinqué, je décide de reprendre la route, ma femme et mes beaux-parents me rejoignent dans 17 kilomètres à la Possession (144ème), c’est parfait !!

127 - 170 km : Je sais que le plus gros est maintenant derrière moi.

Il me reste 4 ascensions :

  • Dos d’âne (5km pour 500m D+) Prévoir de nombreux passages à escalader (+ 3 échelles dans la roche), il reste tout de même costaud !

Bain de foule au sommet au 132ème.

Ensuite descente par la route, point de contrôle à Ratinaud-Kalla (136ème).

  • La Possession (8km pour 600m D-) Descente dans les bois (routes + sentiers), il faudra s’armer de patiente car le ravito est tout en bas (quand je dis tout en bas, c’est vraiment tout en bas), il faudra traverser de nombreux endroits pour y accéder, tout ça dans la bonne humeur !

Arrivé au ravito, j’ai la chance d’avoir sous la main toute une équipe médicale pour me remettre à neuf (ampoules, cheville, jambes…). J’en profite quand même pour recharger mes flasques (grenadine/eau gazeuse).

Je retrouve ma famille à l’extérieur pour un break d’avant fin de course.

Je suis à 37h40 de course pour 144km, le moral est au beau fixe, d’après ma famille je suis dans un bien meilleur état qu’à Cilaos.

Je suis allongé sur une serviette et je déguste un Schweppes agrume, la grande classe J

Pendant ce temps ma femme allège mon sac à dos au maximum.

  • Le Passage des Anglais (7.5km pour 300m D+)

Apparemment, cette partie est redoutée par la plupart des coureurs, bah franchement, il n’y a rien à craindre !

Il s’agit d’un long chemin de pavés, il suffit juste de rester sur la rangée de pierres du milieu et de courir, il n’y a pas de temps à perdre de temps ici, c’est très facile !

Sur le chemin, j’ai la chance de sympathiser avec à un Réunionnais de 67 ans, je deviens très vite son disciple, il me prend sous son aile et m’impose son allure rapide !

C’est à la fois un gain de temps et une pure leçon de trail !

C’est assez déconcertant, on dirait qu’il ne force pas et moi je suis en grande souffrance !

Je l’abandonne un moment car en descente il n’a pas vraiment pas le niveau.

Je profite du ravitaillement de la Chaloupe, (151ème) pour me servir un bon coca et manger quelques fruits en l’attendant, j’anticipe pour sortir ma frontale, car il commence déjà à faire nuit, il est déjà 18h15.

  • Grande Chaloupe (12km pour 500m D+)

Je fais mon maximum pour tenir la cadence de mon coach, mais ce n’est pas vraiment pas facile, le dénivelé n’arrange pas les choses.

Cette portion n’a aucun intérêt, c’est que de la route !

Quelques points de contrôles et des ravitos improvisés par les gens du coin !

Ne pas se fier aux indications fournies par l’organisation, c’est faussé à mort !

  • Colorado (10km pour 900m D+)

J’ai réussi à tenir 17 kilomètres à ce rythme, mais c’est le moment d’arrêter de faire le con.

Je sais que j’ai trop puisé dans mes réserves, mais cet entrainement était très enrichissant, je n’ai aucun regret !

Je le laisse filer en lui disant que je le rattraperais sûrement un jour.

Cette partie n’est pas très intéressante, je dirais même quelle sert à rien….

Cerise sur le gâteau, les bénévoles nous annoncent à chaque fois un kilométrage foireux et c’est franchement décourageant, il vous reste 2.5km, puis ça passe à 5km et après c’est encore 2.5km…

Je rencontre à nouveau un bénévole au pied d’une grosse montagne et il me dit :

- Tu vois l’antenne qui clignote tout là-haut ?

- Oui pourquoi ?

- Bah, il est là-haut le ravito du Colorado

- (…)

Je décide de ne pas perdre de temps, je quitte la route et j’enchaine direct sur l’ascension du Colorados. Le sentier est très étroit, c’est très mal balisé, à mi-parcours le chemin se transforme en une sorte de tranchée où mes mains jonchent les bordures sableuses.

Au bout d’1h30 j’arrive enfin au ravitaillement de Colorado au 161ème kilomètre, la fin est proche !

Les bénévoles sont adorables avec nous, je prends deux soupes chaudes histoire de me réchauffer car il ne fait vraiment pas chaud ici.

Je prends le temps de recharger mes flasques, de grignoter un peu et je vais jusqu’à emprunter la frontale d’un autre coureur car je n’ai plus de batterie…

Dernière ligne droite, 5km pour 700m D- afin de rejoindre St Denis.

On entame cette descente ensemble, mais nous allons vite nous séparer car je suis cuit !

Attention, il y a quelques parties techniques, ça deviendra de plus en plus roulant.

Je commence à retrouver le sourire quand j’aperçois le stade en contre-bas.

A la sortie du bois, il faut passer sous un pont, puis, il suffit de longer la rive pour atteindre le stade. J’arrive pleine balle sous les applaudissements des spectateurs, ces quelques minutes de gloire resteront pour moi un excellent moment.

Je termine en tapant dans les mains des spectateurs avant de franchir en sautant cette mythique ligne d’arrivée de cette Diagonales des Fous 2023 en 49h18 !!

  • Très fier de retrouver ma famille avec ma médaille !
  • De porter ce fameux T-SHIRT jaune « j’ai SURVECU »
  • De récupérer cette boite de sardines du finisher !!!

Je tiens remercier toutes les personnes qui m’ont soutenu tout au long de cette course de dingue, les amis, la famille, les potes et principalement à ma femme et à mon père à qui je leur dédie cette victoire !

Je termine 1046ème / 2866 participants !

Je tiens également à remercier ma cheville qui ne m’a pas abandonné !

Point négatif :

Les ravitaillements sont réservés seulement aux coureurs

Pas de village trail pour d’éventuel(s) achat(s).

Le dossard s’efface rapidement avec les frottements

Peu de réseau pour joindre le PC sécurité

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